Roman-feuilleton – chapitre 7 : Morne plaine (2002-2011)

Textes et analyses | 6 octobre

En 2020, le MAC de Montréal fête ses 50 ans. Pour souligner cet heureux anniversaire et découvrir la riche histoire de notre organisme de défense des sans-emploi, nous publions le roman-feuilleton Le MAC, 50 ans de lutte. Chaque mois, deux (2) nouveaux épisodes pleins de rebondissements vous seront proposés.

Au menu cette semaine : le vol de la caisse d’assurance-chômage (suite et fin), les mascarades législatives, la crise des subprimes, la réingénérie de l’État et les solidarités du MAC.

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MORNE PLAINE (2002-2011)

À partir de 2002, le MAC et les groupes de chômeur.ses se retroussent les manches et se mobilisent pour un régime d’assurance-chômage universel.  Les années qui suivront seront marquées par le regroupement des forces et par le retour de revendications fortes, après quelques années à encaisser le coup des contre-réformes successives. Inépuisables, les groupes de sans-emploi refusent de baisser les bras après le remplacement en 1996 de l’assurance-chômage par l’assurance-emploi.

Rappelons qu’en 1999, les groupes de chômeur.ses s’unissent sous un nouveau regroupement national, le Mouvement autonome et solidaire des sans-emploi (MASSE). Ils s’uniront également durant la décennie 2000 avec les syndicats pour la campagne des sans-chemise.

POUR UN RÉGIME UNIVERSEL D’ASSURANCE-CHÔMAGE

Le début de la décennie 2000 est marqué par la fin de règne des libéraux, le départ de Jean Chrétien et l’arrivée de Paul Martin. Durant ces années, le fédéral ne touchera pas au régime d’assurance-chômage. Les groupes des chômeur.ses quittent le terrain défensif et revendiquent dès 2002 des changements profonds au régime. C’est ainsi que prennent forme les revendications historiques du MASSE (malheureusement toujours d’actualité), soit un taux de prestations augmenté, un seuil d’admissibilité universel de 350 heures de travail dans la dernière année, la fin des exclusions totales pour le départ volontaire ou l’inconduite et l’abolition du délai de carence de 2 semaines.

Face à ces revendications universalistes, le gouvernement Chrétien ne propose rien, si ce n’est que de nouvelles prestations touchant des situations humanitaires, notamment un congé de bienveillance (aujourd’hui prestations de compassion), pour s’occuper d’un.e proche en fin de vie. Sans être contre la vertu, le MAC condamne cette approche. « L’argent de la caisse d’assurance-chômage, dans laquelle le gouvernement fédéral ne met plus un sous depuis 1990, devrait servir à d’autres fins que de bien faire paraître un gouvernement qui ne sait plus que faire pour montrer comme il est beau et bon…(…) La Loi sur l’assurance-chômage n’a jamais eu comme fonction de soulager le système de santé.

La loi ne doit pas être un fourre-tout qui sert à n’importe quelle fin sauf  celle pour laquelle elle a été voté; la protection des chômeurs et chômeuses ».[1]

Le 16 mars 2004, après deux ans de travail, le MAC lance son projet de loi maison, intitulé C-AC (à lire à voix haute !). L’exercice est mené conjointement avec deux économistes de l’IRIS.

« La réforme que propose le MAC de Montréal touche notamment l’exclusion totale du droit aux prestations pour les cas de départ volontaire « non justifié » ou de congédiement pour « inconduite ». Il est primordial de se débarrasser de cette épée de Damoclès suspendue au-dessus de la tête des travailleurs. La menace de perdre son droit aux prestations mène directement aux abus de la part des employeurs. Flexibilité absolue, chantage à l’emploi, menaces, augmentation des tâches et baisse de salaire sont maintenant le quotidien de nombreux employés »[2]

Le MAC revendique également un seuil d’admissibilité unique à 350 heures et un minimum de 35 semaines de prestations d’assurance-chômage. Ces revendications sont aussi celles de la campagne des sans-chemise, qui les fait valoir lors de la campagne électorale fédérale de 2004, alors que Paul Martin cherche à être élu premier ministre face aux conservateurs de Stephen Harper, fruit de la fusion récente du Reform Party et du Parti progressiste-conservateur. Les libéraux sont réélus pour un quatrième mandat consécutif, mais forment désormais un gouvernement minoritaire. Les sans-chemise y voient un signe qu’il faut continuer à exiger une réforme complète du régime.

« À la suite de la mobilisation des sans-chemises lors de la dernière campagne électorale, il nous est permis d’envisager l’avenir de notre lutte avec un certain enthousiasme. Dans le contexte d’un gouvernement minoritaire à Ottawa, nous croyons qu’il est plus pertinent de développer un argumentaire articulé et documenté plutôt que de simplement énoncer quelques revendications comme les groupes de chômeurs et chômeuses l’ont fait dans les dernières années. »[3]

Au lendemain du scrutin, Paul Martin n’envisage cependant aucune nouvelle mesure pour améliorer le sort des sans-emploi. Une fois de plus, le MAC monte au front : « Alors que moins d’un chômeur sur deux reçoit des prestations et que le surplus accumulé du régime frôle les 50 milliards de dollars, le gouvernement n’a rien de mieux à proposer que de « s’assurer que le régime continue à répondre aux besoins de la main-d’œuvre. » (…) M. Martin continue de nier les aberrations contenues dans la loi sur l’assurance-emploi. »[4]

Le silence du gouvernement face à l’état déplorable de la protection qu’offre l’assurance-chômage aux sans-emploi se poursuit après l’élection d’un gouvernement conservateur minoritaire en 2006, puis en 2008. « En effet, il aurait été pour le moins surprenant que le gouvernement décide d’intervenir dans ce dossier en faveur de ceux et celles qui se font voler des milliards depuis maintenant plus de dix ans.

La philosophie conservatrice s’accommode mal des principes de justice, de dignité et de compassion sur lesquels devrait s’appuyer tout régime d’assurance-chômage digne de ce nom.»[5]

Pire encore, malgré la récession économique qui sévit à partir de 2008 suite à la crise des subprimes, le gouvernement Harper se refuse à toute bonification : « Après avoir utilisé les fonds publics pour sauver la mise des entreprises et des banques en faillite lors de la récente crise économique et financière, les gouvernements tentent maintenant de faire porter le poids du rétablissement de l’équilibre budgétaire sur le dos des travailleurs et travailleuses. »[6]

Une fois de plus, l’État répond à la crise par des mesures discrétionnaires au lieu d’améliorer le régime. En 2009, le gouvernement Harper adopte le projet de loi pilote C-50, qui augmente le nombre de semaines de prestations jusqu’à 20 semaines supplémentaires, mais uniquement pour les prestataires de certaines régions.

Pour le MASSE, ce projet de loi-pilote augmente les disparités régionales déjà présentes et éloigne encore davantage le régime des principes de l’universalité.

« Comment peut-on expliquer que deux travailleuses travaillant au même endroit et exerçant le même emploi au cours de la même période  ne reçoivent pas le même traitement du fait qu’elles déposent leurs demandes d’assurance-chômage dans deux villes situées à moins de 50 kilomètres l’une de l’autre ? »[7]

« Dans les faits, C-50 ne touche qu’une petite minorité de prestataires : le gouvernement n’a jamais voulu dévoiler le nombre exact de personnes qui se qualifient à cette prolongation, mais on a laissé entendre qu’il s’agissait d’environ un.e prestataire sur cinq. Pour les autres, et surtout pour les milliers de gens qui ne se qualifient pas pour la crise, le gouvernement Harper n’offre que du vent! »[8] Le constat d’échec est cuisant et C-50 n’est pas reconduit.

Toujours en 2009, au plus fort de la crise, le MASSE obtient presque de voir ses revendications adoptées. Le gouvernement minoritaire de Harper passe bien près d’être renversé en chambre et remplacée par une coalition formée du Parti Libéral, du Bloc Québécois et du NPD. Le chef libéral, Michael Ignatieff, s’engage à ce que la coalition, une fois au pouvoir, modifie la Loi sur l’assurance-emploi pour établir un seuil universel d’admissibilité à 360 heures. Après un intense jeu de coulisses parlementaire, la coalition ne renverse pas le gouvernement Harper et les changements n’ont pas lieu. Les libéraux, en échange de leur appui aux conservateurs minoritaires, obtienne la création d’un comité d’étude sur l’assurance-chômage. Pour la petite histoire, le comité ne se réunit pratiquement pas et ne produit aucun rapport…

Vol de la caisse

«  Depuis de nombreuses années, les gouvernements qui se sont succédés à Ottawa ont détourné des sommes colossales de la caisse de l’assurance-chômage à d’autres fins que celles pour lesquelles ce régime a été prévu. [9]

Comme nous l’avons vu au chapitre précédent, le gouvernement fédéral commence à détourner l’argent de la caisse d’assurance-chômage à partir de 1996. Ce vol de grand chemin se poursuit tout au long de la décennie 2000.  Rappelons également que l’État ne cotise plus à la caisse depuis 1991.

Avec un taux de couverture autour de 40% depuis la série de contre-réformes menée de 1989 à 1996, jamais aussi peu d’argent n’est sortie annuellement de la caisse pour payer des prestations aux chômeur.ses.

Conséquence directe de l’avarice de la caisse d’assurance-emploi envers les travailleur.ses, qui la financent pourtant largement, les surplus n’ont jamais été aussi élevés. Malgré tout, les chômeur.ses ne profitent en rien de ces surplus, alors que chaque année des milliards de dollars continuent d’être détournés de la caisse.

Le MAC considère que le vol de la caisse est double. Aux milliards détournés vers d’autres ministères s’ajoutent les sommes importantes prélevées à même la caisse pour les programmes de formation de la main d’œuvre. Pour les groupes de chômeur.ses, la création en 1997 d’une enveloppe pour les programmes d’employabilité relève d’une approche néolibérale qui individualise le chômage et préfère former un cheap labour adapté au piètre état du marché de l’emploi, plutôt que de développer des politiques économiques cohérentes.

« Le but de la Loi sur l’assurance-emploi a toujours été de compenser les travailleurs lors d’une perte d’emploi. Il est inacceptable que l’État ait utilisé cet argent pour d’autres fins ».[10]

Le MAC propose en 2004 de récupérer les surplus volés par le gouvernement qui devrait  rembourser la caisse à hauteur de 3 milliards par année.

Le MAC propose aussi que l’État réinvestisse dans la caisse à raison de 5,6 milliards par année et qu’il augmente les cotisations de 10% afin d’assurer une meilleure redistribution de l’argent de la caisse aux chômeur.ses.

Dès 2004, les sans-chemises font du vol de la caisse un de leurs thèmes principaux. Le 9 février 2005 a lieu une occupation du bureau de Lucienne Robillard, ministre de Ressources humaines Canada, et le 25 octobre 2005, le MASSE organise une action devant le Parlement à Ottawa pour dénoncer les quelques 50 milliards de dollars détournés de la caisse depuis 1996.

Entretemps, la lutte se transporte devant les tribunaux. Mauvaise nouvelle pour les chômeur.ses, la Cour d’appel du Québec juge le détournement légitime.  «  Le 15 novembre 2006, la Cour d’appel du Québec rendait un jugement sur un recours entrepris par le Syndicat National des Employés de l’Aluminium d’Arvida et la CSN au sujet du détournement de la Caisse d’assurance-chômage par le gouvernement fédéral. Dans leur décision, les juges Robert, Gendreau et Brossard légalisent le détournement et l’utilisation des cotisations d’assurance-chômage à d’autres fins que l’indemnisation des sans-emploi. Autrement dit, la Cour d’appel du Québec entérine le vol d’environ 50 milliards de dollars pris directement dans les poches des travailleuses et des travailleurs du Canada »[11]

« Les juges de la Cour d’appel affirment que non seulement l’État peut disposer de ces sommes comme bon lui semble, mais qu’il ne doit rien à la Caisse. (…) En ce qui nous concerne, cela va complètement à l’encontre du caractère assurantiel du régime. »[12]« En fait, le régime sert actuellement de taxe déguisée qui contrevient à l’esprit de l’amendement constitutionnel de 1940 qui donnait naissance au régime d’assurance-chômage canadien. (…)

Nous devons nous assurer que les milliards volés à la classe ouvrière canadienne lui reviennent de plein droit et serve à remettre sur pied un régime d’assurance-chômage juste et d’accès universel. » [13]

La décision est portée en appel devant la Cour Suprême du Canada. Puis, en 2008, « prenant prétexte d’une revendication syndicale pour une « Caisse autonome », le gouvernement annonce dans le cadre du budget, la création d’un Office de financement de l’assurance-emploi qui devra veiller à ce que les cotisations prélevées ne correspondent qu’aux seules dépenses du régime. Non seulement le projet de loi ne contient aucune bonification de la protection du régime, mais l’Office (…) ne pourra prendre aucune décision quant à la couverture du régime ni tenir compte du surplus cumulatif du compte qui atteint alors 54 milliards de dollars. Cependant, le surplus continue d’apparaître dans les comptes publics du Canada. »[14] « Pour le MAC de Montréal, il ne fait aucun doute que cette dernière trouvaille gouvernementale est un geste politique visant à faire disparaître définitivement le surplus de 54 milliards de dollars de la Caisse d’assurance-chômage. De plus, l’Office verrouille à son état actuel la couverture du régime annonce que les seules modifications possibles à cette dernière seront dorénavant à la baisse. »[15]

« En décembre 2008, la Cour Suprême maintient pour l’essentiel le jugement Gascon, le gouvernement fédéral pouvait utiliser les surplus du Compte d’assurance-emploi pour ses dépenses générales, en autant que le lien juridique entre les cotisations et les dépenses du régime était maintenu. Le Parlement modifie ensuite la loi pour répondre à cette exigence. »[16]

Puis, aidé par la caution fournie par la Cour Suprême, survient ce que tout le monde voyait venir depuis longtemps.  Dans son budget 2010, le gouvernement Harper annonce la disparition rétroactive au 1er janvier 2009 du surplus cumulatif du compte renommé « Compte des opérations de l’assurance-emploi ». Le détournement du surplus sera alors complété. L’Office de financement jouera désormais son rôle de chien-de-garde des dépenses du Compte. Plus de vols, mais plus de surplus possibles pour améliorer le régime. »[17]  Avec ce nouveau Compte des opérations, le projet de faire participer de nouveau l’État au financement de la caisse disparaît. Avec la disparition des surplus, l’espoir d’une amélioration du régime en prend lui aussi pour son rhume. Sans compter la rage de voir près de 60 milliards de cotisation être détournés par 3 premiers ministres et 6 législatures, sous l’œil bienveillant de la Cour suprême !

Ou comment détourner 60 milliards de dollars sur le dos des chômeur.ses sans se fatiguer…

Encore les délais

Le vol de la caisse et l’inaction du gouvernement perpétuent et aggrave l’inaccessibilité de l’assurance-chômage. Le MAC est donc occupé à revendiquer, mais aussi à défendre les chômeur.ses qui se présentent chez lui. Chaque année, ils et elles sont des milliers à bénéficier de l’aide du MAC. Avec ses 3 séances d’information par semaine, son service téléphonique et des centaines de dossier de contestation devant le Conseil arbitral et le juge-arbitre, le MAC est présent sur tous les fronts.

Fidèle à  sa tradition, il agit comme chien-de-garde face à la machine administrative que représente la Commission d’assurance-emploi. Une campagne de cartes postales à Jane Stewart sur la question du nouveau calcul dettes est lancée en 2002.  « Le MAC de Montréal dénonce la volonté du ministère du développement des ressources humaines du Canada (l’assurance-chômage) d’imposer des intérêts aux travailleurs ayant une dette frauduleuse envers le gouvernement. Dernière en date des actions posées par la ministre Jane Stewart découlant de sa névrose obsessionnelle anti-chômeurs, maladie qui depuis au moins 14 ans frappe tous les titulaires du portefeuille – bien garni – de l’assurance-chômage, l’imposition d’intérêts sur les dettes frauduleuses vise deux objectifs. Le premier, faire cracher encore plus les chômeurs et ex-chômeurs dans la cagnotte débordante de fric qu’est la caisse d’assurance-chômage. Le deuxième, détourner la Loi qui donne au ministère six (6) ans pour recouvrir les sommes. »[18]

La lutte se transporte ensuite sur le front des délais, toujours aussi inacceptables. «  Il y avait à la mi-janvier 2005 , près de 80 000 demandes en attente de traitement, dont près de 5000 excédants le délai de 28 jours. Cette situation est absolument intolérable : 28 jours sans emploi et sans revenu peut être déjà assez difficile, faire attendre les chômeuses et les chômeurs davantage, c’est inacceptable. Il y a les comptes à payer et il faut se nourrir. La vie ne s’arrête pas le temps que la Commission rendre une décision. »[19] Et la création de Service Canada en septembre 2005, au détriment des anciens bureaux de chômage, n’améliore pas vraiment la situation…

« Service Canada, le nouveau machin qui regroupe différents ministère et services connaît des débuts cacophoniques.

Certains fonctionnaires nagent dans la choucroute, des retards sont constatés dans le traitement des dossiers et les différentes appellations du ministère, les nombreux changements de noms, de titres, de services sont comme un puzzle auquel il manque des pièces. Quelqu’un quelque part doit se bidonner. »[20]

Le 25 octobre 2006, le MASSE lance son dossier noir de l’assurance-chômage. « Pour palier à sa gestion inepte, Service Canada opte pour des moyens pour le moins discutable. Nous apprenions récemment que la direction de Service Canada aurait ordonné à son personnel ontarien de ne plus traiter les demandes datant de plus de 28 jours, truquant ainsi les données de rendement. Tout cela dans le but de masquer une gestion déficiente à tous les niveaux. »[21]

La centralisation vers Service Canada s’achève en 2011 et est encore une fois synonyme de difficultés d’accès à l’assurance-chômage, pour ceux et celles qui sont peu à l’aise avec les nouvelles technologies et les personnes analphabètes, entre autres.

« On apprenait cet été la fermeture de bureaux administratifs de traitement des demandes d’assurance-chômage pour laisser place à de méga-centres d’un océan à l’autre, se fiant au dieu Internet pour tout régler. Quelle triste farce. » [22]

LES SOLIDARITÉS DU MAC

Comme nous l’avons vu, l’absence de vastes contre-réformes dommageables durant la décennie 2000 permet aux groupes de chômeur.ses de développer leurs revendications. Ce (relatif) répit est ainsi l’occasion pour le MAC de déployer ces solidarités avec d’autres acteurs de changement social et de lutte à la pauvreté.  Sur le plan du droit du travail, le MAC milite pour faire encadrer et sanctionner le harcèlement psychologique. Des liens nouveaux se tissent pour défendre les travailleurs agricoles mexicains et guatémaltèques, les travailleur.ses d’agence de placement et pour revendiquer une augmentation substantielle du salaire minimum.

La décennie 2000 est aussi marquée par les mobilisations populaires et syndicales contre le gouvernement Charest et sa réingénérie de l’État, un plan d’austérité avant la lettre.

Le MAC se soucie de l’érosion du filet social, sort contre les partenariats public-privé (PPP) et les amendements au Code du travail favorisant la sous-traitance. Il se positionne également contre le projet de loi de lutte à la pauvreté, qu’il qualifie d’hypocrisie pure. « Ce projet de loi s’inscrit dans la suite des politiques qui, au Québec et ailleurs, depuis une vingtaine d’années, ont harnaché le droit à l’aide sociale et accru la pression à l’adaptation au travail précaire et mal payé par des mesures d’employabilité, de contrôle, d’insertion, etc. Nous refusons d’avaliser le projet de loi 112, qui constitue une extension du nivèlement par le bas de nos conditions de vie et de travail. Nous proposons plutôt de nous organiser et de résister pour renverser le courant car l’histoire des luttes sociales démontre que c’est la seule voie porteuse ».[23]

Le MAC est, plus que jamais, solidaire des luttes des sans-emploi prestataires d’aide sociale, dont plusieurs auraient très bien pu être prestataires d’assurance-chômage avant 1996.  Il condamne le projet de loi 57 qui, en 2004, sépare la solidarité sociale de l’aide sociale, cristallisant les logiques du bon pauvre et du mauvais pauvre. Une manifestation est organisée sur le thème du discours du trône.

« Sam Hamad trompe la population avec ses sorties médiatiques de lutte contre la pauvreté alors qu’il s’en torche, des pauvres. »[24]

Le MAC participe aussi aux mobilisations de la Coalition Main-Rouge contre la tarification et la privatisation des services publics et descend dans la rue pour la reconnaissance de l’action communautaire autonome. Il donne aussi un appui aux revendications étudiantes sur la gratuité scolaire, à l’amélioration de l’aide juridique et au refus des résident.es de Pointe-Saint-Charles de se voir imposer un casino dans leur quartier.

De 2009 à 2011, le comité de mobilisation organise plusieurs soirées d’éducation populaire sur des thèmes variés : Marche mondiale des femmes, itinérance et profilage social, droits des locataires, lock-out au Journal de Montréal, partenariats public-philanthropiques (PPP sociaux).

La décennie 2000 est aussi témoin de la naissance d’un nouveau front de lutte, celui pour l’accessibilité financière du transport en commun pour les personnes à faible revenu. Pour le MAC, tout le monde a le droit de se déplacer et la cherté du transport en commun entrave ce droit, notamment pour les chômeur.ses devant se chercher un emploi.

« 29% de la population québécoise vit sous les seuils de faibles revenus tels que définis par Statistiques Canada. L’augmentation des tarifs a un impact encore plus important pour ces personnes puisque leur budget subit déjà une multitude de ponctions (loyer, nourriture et vêtements, tarifs d’électricité, frais scolaires, assurance-médicaments, etc). La grande majorité de ces ménages n’a pas d’auto. Plusieurs n’ont tout simplement pas les moyens de prendre le transport en commun. À chaque hausse de tarifs, de plus en plus de gens y renoncent. (…) Les personnes financièrement moins nanties ont elles aussi le droit de se déplacer »[25]

« De plus en plus, le droit à la mobilité est évoqué au même titre que le droit au logement. Le droit à la mobilité, c’est de permettre, à tous et à toutes, l’accès à l’ensemble des ressources urbaines : l’emploi les services, l’éducation, la culture, les loisirs, etc. Au lieu de confiner les moins riches dans leur environnement immédiat, il s’agit plutôt de briser leur isolement. »[26]

À l’été 2006, un rassemblement a lieu devant l’Hôtel de ville de Montréal pour demander une tarification sociale, soit un tarif réduit pour les personnes à faible revenu.

« Nos souliers sont usés d’avoir marché plusieurs heures par jour pour combler nos besoins quotidiens.

Il est temps que le Ministère des transports investisse massivement à la STM pour instaurer une tarification sociale pour les personnes à  faible revenu ».[27] Comme nous le verrons aux prochains chapitres, cette lutte connaîtra d’importantes avancées dans les années suivantes.

Prochain chapitre : Le saccage de Harper (2012-2014)

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[1] « Jusqu’où ira le détournement », Hans Marotte, InfoMAC, été 2003

[2] « Le régime d’assurance-chômage : des changements s’imposent », communiqué de presse, MAC de Montréal, 12 mars 2004

[3] « Reprendre l’initiative », Hans Marotte, InfoMAC automne 2004

[4] « Discours du Trône : et les chômeurs Monsieur Martin? », communiqué de presse, Mac de Montréal, 5 octobre 2004

[5] « Le gouvernement Harper : nouvelle droite? », Martin Richard, InfoMAC, printemps 2006

[6] « L’homme derrière les coupures en Grande-Bretagne », Jacques Beaudoin, InfoMAC, hiver 2011

[7] « Discrimination à l’assurance-chômage : ils avaient le même emploi mais ne résidaient pas dans la même ville ! » , Hugo Desgagnés, InfoMAC, hiver 2009

[8] « Le gouvernement Harper face à la crise : Que des miettes pour les chômeurs et les chômeuses », Jacques Beaudoin, InfoMAC, hiver 2010

[8] Ibid.

[9] Marotte, op. cit.

[10] Projet de Loi sur l’assurance-chômage, MAC de Montréal, 2004

[11] « La Cour d’appel du Québec entérine le vol d’environ  50 milliards de la caisse d’assurance-chômage », InfoMAC, automne 2006-hiver 2007

[12] Ibid.

[13] « Vol de la caisse d’assurance-chômage : la Cour suprême accepte d’entendre la cause », InfoMAC, été 2007

[14] « Les derniers développements à l’assurance-emploi et quelles leçons en tirer », Georges Campeau, 40 ans du Mouvement Action-Chômage, 2010

[15] « Hausser les tarifs, c’est avancer vers l’arrière », InfoMAC express, édition spéciale, printemps 2008

[16] Campeau, op. cit.

[17] Ibid.

[18] « Assurance-chômage ; comment détourner la Loi, par Calamity Jane », Martin Richard, communiqué de presse du MAC, 17 avril 2002.

[19] Lettre du MAC à Monte Solberg, ministre des ressources humaines et du développement social du Canada, Benoit Marsan, document interne du MAC, 20 février 2005

[20] « Du nouveau en assurance-chômage », Martin Richard, InfoMAC, hiver 2005

[21] « Le Mouvement Autonome et Solidaire des Sans-Emploi lance son Dossier noir de l’assurance-chômage », communiqué de presse, MASSE, 25 octobre 2006

[22] « Restructuration administrative : Le hachoir, la bêtise et le citoyen », Martin Richard, InfoMAC, automne 2011

[23] « Le projet de loi anti-pauvreté : La continuité des politiques de précarisation », OPDS, InfoMAC, hiver 2002

[24] « Plan de lutte à la pauvreté. Les consultations de Sam Hamad : le discours du trône ! », Organisation populaire des droits sociaux de la région de Montréal (OPDS), InfoMAC, hiver 2010

[25] « Accès au transport en commun. Une tarification sociale pour les personnes à faibles revenus : C’est possible, c’est nécessaire ! », TROVEP de Montréal, mars 2006

[26] « Transport en commun à Montréal : Neuvième hausse des tarifs en 6 ans… », Mathieu Robillard, InfoMAC, hiver 2009

[27] « Nos souliers sont usés! Réduisez les tarifs du transport en commun à Montréal maintenant ! », Lettre à la ministre des Transport Julie Boulet, Benoit Marsan, MAC de Montréal, 4 juin 2007