Le taux
Textes et analyses | 23 juillet
Depuis le début de 2019, le taux de chômage est inférieur à 6 % à Montréal. Ce qui signifie qu’un.e travailleur.se doit avoir accumulé 700 heures de travail dans l’année pour être admissible aux prestations de chômage. En 2018, le taux de chômage officiel pour la région de Montréal oscillait entre 6,1% et 6,3%, ce qui fait qu’on devait avoir accumulé 665 heures de travail dans l’année. En effet, c’est le taux de chômage dans la région où le ou la prestataire réside qui définit le nombre d’heures nécessaire pour toucher la pitance que lui versera l’État. Plus le taux de chômage est bas, plus la norme (nombre d’heures) est élevée pour toucher des prestations. Sans oublier le nombre de semaines payables qui diminue en conséquence (entre autre impact, le trou noir).
Le hic, c’est que le taux de chômage est une blague. Une vieille blague. Ce taux ne reflète en rien le vrai pourcentage des sans-emploi. À deux reprises durant les dernières années, nous nous sommes amusés (enfin…) à calculer un taux de chômage qui s’approcherait un peu plus de la réalité. Nous avons pris les indicateurs les plus récents et pertinents (population apte au travail, nombre de chômeurs recevant des prestations régulières, assistés sociaux aptes au travail, etc.) et, après avoir passé le tout à la calculette, le taux de chômage de Statistique Canada se retrouvait multiplié par deux !
On sait tous que depuis trente ans, sous les Mulroney, Chrétien et Harper, le but du programme d’assurance-chômage (assurance-emploi étant une autre bonne blague) est de ne pas payer de prestations. L’OCDE, entre autres, avait été particulièrement claire sur ce point en 1995, pendant la réforme des libéraux qui a eu pour effet d’exclure plus de la moitié des chômeurs (et surtout chômeuses) du régime, et qui s’est traduit par de titanesques surplus (68 milliards). Le montant des prestations, le nombre de semaines payables, les exclusions et toute la plomberie légale (quand ce n’est pas l’administration) visent cet objectif. Le capitalisme s’accommode très mal de bons programmes sociaux.
Si le gouvernement de Justin Trudeau a apporté quelques modifications positives dans son budget de 2016, il ne s’est pas attaqué à une réforme qui protégerait réellement les travailleur.se.s en cas de rupture d’emploi.
Donc, quand vous entendrez, lirez et verrez délirer les politicien.ne.s et autres comiques-troupiers sur le fabuleux taux de chômage dans votre région (ou à la grandeur du pays), ayez une pensée pour tous ceux qui auront droit à un gros rien.