L’avis du tribunal : l’exploitation d’un travailleur immigrant
Lois et règlements | 11 décembre
Arun est un travailleur de 68 ans originaire du Cambodge. Depuis 20 ans, il est concierge-plongeur dans un restaurant. Ses conditions de travail sont terribles, l’employeur est colérique, les accidents de travail sont nombreux et jamais dédommagées (brûlures, cuisine minuscule et non-adaptée, maladies professionnels, etc.), tandis que les heures supplémentaires et les congés ne sont pas payés correctement.
Chaque année depuis 20 ans, Arun part 1 mois au Cambodge, ce qui est accepté par le patron, également d’origine cambodgienne, comme tous ses employés. Cette année, en revenant de son séjour à Phnom Penh, il se présente au restaurant et apprend qu’il n’y travaille plus. Le patron est hors de lui, car la fille d’Arun a dénoncé les conditions de travail au restaurant sur les réseaux sociaux et évoqué l’esclavage moderne.
Arun comprend qu’il est congédié. Sans revenu, difficilement employable, Arun fait une demande d’assurance-chômage. Son ancien patron écrit dans le relevé d’emploi qu’Arun a démissionné, car il est parti sans sa permission au Cambodge. Arun tente de s’expliquer, mais peine y arriver, ne parlant que khmer et étant analphabète, toute langue confondue. La Commission d’assurance-emploi ne comprend pas ce qu’il dit, décide de croire le patron sur parole et refuse la demande pour cause de départ volontaire non-justifié.
En révision administrative, Arun n’a toujours pas accès à un.e interprète et demande de l’aide à une voisine qui l’aide de son mieux, mais n’y comprend pas grand chose. La Commission confirme sa décision et Arun continue de vivre sans le sou. Il cogne finalement à la porte du Centre des travailleurs et travailleuses immigrants (CTI), qui contacte à son tour le MAC de Montréal. Ensemble, nous préparons le dossier à l’aide d’un interprète khmer-anglais qui s’implique au CTI. Le tribunal fournit également un interprète lors de l’audience. 7 mois après sa perte d’emploi, Arun peut enfin s’exprimer clairement et raconter son histoire à quelqu’un qui l’écoute et lui accorde de la crédibilité. Et il gagne sa cause ! Trop tard pour éviter un endettement profond et des mois de vache maigre, mais juste à temps pour éviter d’être évincé de son logement pour non-paiement du loyer.
La morale de l’histoire : la Commission n’accorde pas de crédibilité aux travailleurs.es, encore moins aux immigrant.es allophones. Défendez vos droits !!!